Clara et Hannah ouvrent leur blog, au printemps 2011 : l'écureuil du net ! à lire absolument !!!!
Merci à François Bon, qui a accueilli sur Publie.net les Carnets Lointains, et le Manuel anti-onirique.

mercredi 6 janvier 2010

Vanités…, VI



De légères incantations.

Elles glissent à la surface du jour, semblables à la condensation lente qui, le long de la vitre, lui fait regarder le monde à travers des larmes (elles ne sont pas les siennes).

Sa main s'approche, elle tremble un peu, elle hésite dans la courbe de son geste, mais réajuste, s'approche de la bougie qu'elle allumera, la flamme monte, tremble dans la pénombre, et laisse des zones d'ombre dans le crépuscule qui tombe. Toutes les limites du monde connu ne sont pas encore bien dessinées, et parfois, le tracé des frontières s'entremêle.

De très légères incantations.
Elles restent suspendues tacitement : les paroles n'en sont plus connues. Les formules ont échappé. Ce qui se chuchotait dans la course du monde a sombré dans l'oubli. Nous serons les premiers à ne pas les répéter.

Le monde silencieux se recouvre de neige, s'allonge dans un oubli horizontal et trompeur. Les bruits s'étouffent d'eux-mêmes, les gestes devenus imprécis, parfois, manquent leur course. Il arrive que des liquides se renversent, que des verres se brisent, qu'une aspérité s'enfonce dans l'épaisseur d'un tissu et en disloque les fibres.

Dans la mosaïque des mois, il y a parfois d'étranges recompositions. Minuscules carreaux multicolores — nul n'a pris soin de les assembler. Les jointures en disjonction font d'étranges jeux dans ses pensées désarticulées,
et des lézardes grimpent le long de l'être des fentes, des interstices, des entrebaîllements, des fissures… comme une petite béance.

Pourquoi souhaiter encore l'assemblage ? Il reste l'étrange possibilité, au soir venu, dans une pièce à peine éclairée, de faire un portrait photographique
— de ce que nous tentons d'être.


3 commentaires:

  1. D'une incantation qui ne peut opérer ( formules oubliées) tu fais une magie qui opère, parce qu'elle détourne des effets et ramène à soi, par des mots qui sont ce qu'ils devraient être, des failles. C'est une pure vanité et une vanité pure ( qui ne se vante pas). La flamme est indécise comme le geste, les contours? on ne sait, mais le lecteur est touché si précisément!

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  2. A portée de toute incantation qui pourrait rassembler. Mais à quoi bon ? L'aspérité de nos fêlures, la juxtaposition de nos "moi" comme de nos émois ne se suffisent-ils pas pour être un tout ?

    Question hors vanités d'un soi, d'un moi qui interprète. Juste, je ne suis pas sûr.

    Hello Isa et bon week-end
    :)

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  3. Ces mots-là, cela me fait trembler. Merci.

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