L'été avait déployé les mouvements, leurs ombres portées étaient courtes et glissaient sur le sable, la chaleur du jour avait doré la peau, et le vent de la mer ne laissait sur les doigts que le goût du sel —l'insouciance de l'été permettait de nouveau d'effleurer les joies de l'enfance (elles sont donc possibles ? même s'il n'est plus temps de tendre la main vers elles).
À présent que le jour décline de plus en plus vite, et que la nuit gagne, je reste figée à cette seule pensée. Elle est passée fugacement, un dimanche soir, pendant que le monde sombrait dans la nuit sans oubli, elle revient, insistante, et s'insinue dans l'esprit qu'elle ne lâche plus : je me rends compte maintenant qu'il va falloir reprendre l'oscillation pendulaire. À mes jours se déroberont deux fois par semaine trois heures dix-huit minutes.
Et pour cela il faut revenir, attendre, aux pieds des tours à la verticale écrasante, réserver, prévoir, programmer, hacher le temps d'allers et de retours, je comprends qu'aucun déploiement ne sera plus possible pendant des mois. Pour dormir il faudra se replier sur soi, trouver une improbable solution. Le sectionnement du temps sera aussi un sectionnement de l'espace.
Les déplacements (puisqu'en effet le corps est déplacé, c'est la seule chose dont je sois sûre, je n'ai pas trouvé de réponse à la question de Poincaré, je ne sais pas, je l'avoue, si nos idées voyagent avec nous, si les voyages les modifient, si nous sommes autres dans des lieux autres, je n'en sais rien) reprennent. Il faudra de nouveau descendre le boulevard, laisser la lumière croître et décroître pendant que les trains imperturbablement roulent, et dans l'aube comme dans le crépuscule, il faudra coûte que coûte retrouver la légèreté de la marche.
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