Clara et Hannah ouvrent leur blog, au printemps 2011 : l'écureuil du net ! à lire absolument !!!!
Merci à François Bon, qui a accueilli sur Publie.net les Carnets Lointains, et le Manuel anti-onirique.

dimanche 18 juillet 2010

Cahiers d'un autre été, X (en équilibre)

Alors à l'heure où les ombres s'allongent, l'enfant glisse sa main dans la mienne. Les ombres s'allongent sur le sable. La mienne est à perte de vue. Elle part de mes pas et pointe une direction dont je m'éloigne. La sienne accentue la difference de taille entre nous. Les minuscules reliefs du sable se remplissent d'ombres projetées, et se soulignent d'une bordure grisée. Nous nous éloignons dans le soir qui tombe. Nous marchons vers le soleil couchant, le long du rivage, dans le temps minuscule où ses pas le porteront, et c'est à ce moment-là que l'enfant glisse sa main dans la mienne.

La fraîcheur du soir monte et s'étend sur nous comme un vêtement que les embruns ont traversé et qui ne nous réchauffera plus. Le soleil a triomphé toute la journée. Et maintenant la fraîcheur de la nuit humide tombe sur cette partie du monde où les ombres s'allongent. Il serait temps de rentrer, mais rentrer dans un soir d'été avant que la nuit ne soit avancée, avant que nous n'ayons plongé en elle, ce serait abandonner l'infini. Je ne veux pas encore revenir sur mes pas. Clore l'infini et s'en refuser la très souple rêverie.

Alors tant que la fatigue ne pèse pas sur ses épaules, tant qu'elle ne rend pas son pas moins assuré, nous continuons encore un peu. Encore un peu est tout ce qui me reste de ce jour. Au loin, contre la falaise, les vagues se brisent dans des gerbes d'écume. La marée monte. L'espace bascule dans une nuit humide et bleutée. Il me reste encore un peu de ce jour. Sa main dans la mienne est douce et tiède.

Je crois que l'enfant ne se préoccupe absolument pas de moi. Des histoires immenses et compliquées l'absorbent tout entier. Sa voix les incante doucement, son chant les invoque, puis les disperse dans la légèreté de l'air et dans les embruns. Sa main dans la mienne lui suffit. Sa main dans la mienne me suffit. Le monde bascule dans le calme de la nuit et sa main dans la mienne lui donne un point fixe qui le mène à travers ce crépuscule.

Un instant, le vertige qui me saisit est en équilibre parfait.

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