Un peu abasourdie de ce mélange de classicisme et de sauvagerie brutale, à l'entr'acte, j'hésite à quitter ma place.
Les yeux encore fixés
rivés
à la scène.
Du premier rang du parterre. Les acteurs suent, postillonnent, font des efforts tellement visibles pour éructer élégamment. Leurs visages maquillés sont des masques. De plus loin, ils recouvreraient leur aisance — mais, là, de si près, se perçoivent leur souffrance, leur travail, la mécanique de leurs gestes. Deux guerriers immenses s'affrontent en alexandrins. Vus de ma place, ils inspireraient une terreur enfantine, presque archaïque, contre laquelle l'artifice de la situation protège.
Dans la barbarie maîtrisée de sa colère,
il a levé son verre au dessus du vide,
ses muscles se sont contractés un peu plus qu'il ne voulait,
il l'a cassé
tendu au dessus de moi.
Le verre éclaté sous la pression s'est répandu en une myriade de bouts tranchants, a glissé sur ma veste, s'est répandu sur ma jupe.
Il faudrait que je me lève pour secouer ces éclats d'un autre monde.
La salle à présent est presque vide. J'arpente les couloirs du théâtre quand
d'une porte silencieuse
est sortie la Reine, robe immense de taffetas bleu gris qui souligne ses cheveux roux
— ou est-ce l'inverse ?
Visage anxieux de me croiser.
J'ai l'impression qu'elle ne devrait pas être là
ou voudrait ne pas me croiser. Je m'efface contre le mur. Elle disparaît par une autre porte.
J'ignorais
que les apparitions ont une odeur d'iris.
Émerveillement ou perception accrue que tout ceci n'est qu'un jeu.
RépondreSupprimerCette enfant me paraît trop enclin au discernement.
Restent les fragrances d'Iris. De la fleur à la prunelle de ses yeux.
Joli!
Ce qui nous ramène à l'enfance vient beaucoup plus tard, une fois qu'elle est perdue. Il n'est pas nécessaire d'imaginer que la voix qui parle est enfantine, dans ce texte. Mais évidemment, le lecteur a une liberté entière. La mosaïque de la recomposition est ce qui m'intéresse en ce moment dans l'écriture, l'extraction de ce qui a été senti, par des détournements, et des ajouts. Merci à ta lecture de la vie qu'elle lui donne.
RépondreSupprimerhm... oui, mais il y a toujours une part enfantine dans nos écrits. Peut être ai-je une part de lecture enfantine exacerbée. Peut être.
RépondreSupprimer"Nous méconnaissons ce qu'il y a d'encore enfantin, pour ainsi dire, dans la plupart de nos émotions joyeuses." [ Henri Bergson ]
et j'ajoute "mélancoliques".
une touche enfantine alors, jle jardin de Giverny Monet.... sentait aussi l'iris cmais elui de Isa m'impressionne et j'adore na !
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