Clara et Hannah ouvrent leur blog, au printemps 2011 : l'écureuil du net ! à lire absolument !!!!
Merci à François Bon, qui a accueilli sur Publie.net les Carnets Lointains, et le Manuel anti-onirique.

vendredi 4 mars 2011

Les Vases communicants avec Louise Imagine - Mars 2011


« Le premier vendredi du mois, chacun écrit sur le blog d’un autre, à charge à chacun de préparer les mariages, les échanges, les invitations. Circulation horizontale pour produire des liens autrement… Ne pas écrire pour, mais écrire chez l’autre. » Vases Communicants




Traces…

Nos pas sur le sable sec croisent ceux de tant d’autres. À droite, les empreintes lourdes de chaussures à crampons. Devant, la course aérienne d’un chien s’ébrouant follement. À gauche, les pattes frêles d’une mouette en quête de nourriture. Je ne me lasse pas de ces étranges trajectoires, pistes entrelacées qui nous rapprochent insensiblement du rivage. De ton côté, tu cherches les coquillages, te baisses lorsque tu en trouves un à ton goût, le caches bien au creux de ta paume comme le plus précieux des objets… Concentrée, les sourcils froncés, tu t’adonnes entièrement à ta tâche, la quête n’est pas aisée, le choix s’avère délicat. Combien ton poing serré peut-il en contenir ? Quatre ? Cinq ? À peine… Vent frais contre ta joue rosée. Le duvet fin et doré de ta nuque se soulève avec grâce, hésitation entre ciel et épaules, immobilité furtive et miraculeuse, puis le scintillement reprend, vent et soleil jouent à te chatouiller.


Je reste un pas derrière toi. La courbe ronde de ta joue se dessine dans la lumière, battements de tes grands cils pour chasser le sable en suspension. Au loin, la musique du manège hachée par le vent… Au loin, les cris des enfants qui jouent au ballon… Au loin, les rires d’une bande d’adolescents venus déjeuner devant la mer… Tout d’un coup tu t’agenouilles, intriguée par un détail. Rien peut-être, une poussière, un miroitement particulier. Tes petits doigts cherchent, creusent et découvrent. Fièrement, tu brandis devant toi une minuscule coquille blanche, lisse, translucide. Un nacre délicieux, juvénile et irisé. Les mains pleines à présent, tu avances à pas pressés vers le rivage, tu cours presque, puis soudain, tu t’arrêtes, tes semelles dans l’eau. Un immense sourire sur le visage. Je voudrais te dire de reculer, que tes chaussures sont mouillées, que tu vas attraper froid et que ce n’est pas la bonne saison pour se baigner, mais les mots restent coincés au creux de ma gorge, certitude vibrante qu’ils seraient déplacés. Les vagues venant se briser sur tes chaussures, elles-mêmes, ne semblent pas te déranger. Tu te mets à parler, voix douce et chantante. Je ne comprends pas. Tu parles, sans que je ne puisse en percevoir le destinataire, tes mots s’enchainent, fluides en une envoûtante mélopée. Et peu importe s’il elle n’a aucun sens pour l’adulte que je suis, elle ne m’est pas adressée. Tes bras s’agitent un peu puis se calment, ta voix devient plus grave et apaisée… Avec une infinie délicatesse - une délicatesse que je ne croyais pas possible pour une enfant de ton âge - un à un, solennelle, tu jettes à la mer les merveilleux coquillages que tu avais si chèrement glanés.


Fascinée, retenant inconsciemment mon souffle, je te regarde faire, témoin privilégié de je ne sais quel rituel précieux effacé de ma mémoire, inondée par la beauté éblouissante de ce que tu accomplis.




Texte et photo de : Louise Imagine


Vous pouvez retrouver mon texte pour les Vases communicants ici

Liste des autres participants aux Vases Communicants de mars 2011 :

Candice Nguyen et Christine Jeanney

Sam Dixneuf et Stéphane Bataillon

Juliette Mezenc et Christophe Grossi

François Bon et Guillaume Vissac

Michel Brosseau et Jean-Marc Undriener

Estelle Javid-Ogier et Jean Prod'hom

Anna Vittet et Joachim Séné

Cécile Portier et Christophe Sanchez

Clara Lamireau et Urbain trop urbain

Anita Navarette-Barbel et Arnaud Maïsetti

Morgan Riet et Murièle Modély

Nolwen Euzen et Benoit Vincent

Maryse Hache et Michèle Dujardin

Elise et Piero Cohen-Hadria

Anne Savelli et Franck Queyraud

Dominique Hasselmann et Dominique Autrou

Marlène Tissot et Vincent Motard-Avargues

Kouki Rossi et Brigitte Célérier

2 commentaires:

  1. Rien ne ressemble plus à une plage qu'une plage, mais là, il me semble le ciel, le sable et les traces de voitures, il me semble trouver quelque chose du Cotentin (on aime projeter voyez)
    PCH

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  2. on ose à peine mettre des mots pour ne pas froisser cette délicatesse

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