Clara et Hannah ouvrent leur blog, au printemps 2011 : l'écureuil du net ! à lire absolument !!!!
Merci à François Bon, qui a accueilli sur Publie.net les Carnets Lointains, et le Manuel anti-onirique.

vendredi 20 mai 2011

L'∞, Épilogue, 6

Régénérescence.

Plus tard, la pluie fine et tiède ne cessait plus, délavait les lignes, les contours, les couleurs, la pluie fine ne cessait plus. Et tout se fondait l'un dans l'autre, tout s'absorbait l'un dans l'autre, s'effaçait de soi-même, s'estompait sans bruit dans la dissolution du monde et le clapotement de l'eau. Estompe - en demi-teinte. Une aquarelle très mouillée, très défaite, sur laquelle la pluie termine les possibles, finit de les déliter, de les défaire.

Paysage gris et doux, grisé, estompé, ∞ment indistinct, le gris pâle du ciel se fond dans la mer devenue elle-même presque grise, se noie de brume, qui flotte au ras des vagues presque immobile, caresse le rivage, enveloppe la mer qui se fond dans le ciel devenu presque pâle, en retour, noyés l'un de l'autre, également, au point qu'ils ne se distinguent plus, se fondent, se confondent l'un et l'autre, le ciel gris et la mer grise et immobile, qu'aucun souffle de vent ne vient plus soulever, et derrière la brume épaisse et immobile, pourtant, la chaleur du soleil se sent, et continue de caresser la peau et de la distinguer du marbre froid et lisse de la statue.

Il suffit de s'éloigner de quelques pas, quelques pas suffisent, presque rien, pour que la ligne verticale et complexe de la statue féminine et charmante, et délicieuse, vraiment, ligne charmante, délicieuse, chantournée, ses bras féminins, élégants, une épaule nue, et arrondie, et ses courbes oh !, que tout cela disparaisse dans la brume. Se fonde, se noie, s'estompe, se défasse, se perde dans les lointains de ma conscience. Qu'elle se noie, qu'elle se fonde, je ne serai jamais comme elle, je ne suis pas elle, je ne serai jamais comme elle, "pathético-féminine" et je déteste, autant que Joyce, "les prunelles pathético-féminines" qui me servent de sourire, relèvent les coins de mes lèvres, pendant que je laisse Ulysse à sa fascination.

Le sel et l'eau, sur ma peau. L'eau, comme un bracelet, autour de mes chevilles. Pieds nus, là où les vagues se retournent quand il y en a, et soulèvent des myriades de coquilles brisées qu'aujourd'hui, insensiblement, elles déplacent à peine. L'eau, comme un bracelet froid. Métal liquide et frais. Qui remonte, le long de mes jambes, au fur et à mesure que je m'avance dans l'eau, ondulations minuscules de l'eau, un peu plus haut, un peu plus bas sur ma jambe, presque rien, les ondulations de l'eau, à peine, montent et descendent, j'avance, je m'avance, la mer m'absorbe, et j'ai l'impression, au fur et à mesure que je me fonds dans le paysage, que ma conscience, en retour devient de plus en plus aigüe.

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