Il fallait effacer seule une autre mer, effacer seule d'autres vagues, d'autres courants marins, une mer étale, et pour cela, l'effacer seule, Ulysse ne me serait d'aucune aide, évidemment d'aucune aide, il me fallait effacer cela seule, d'un geste qui soit le mien, le mien propre, et donc, je n'avais pas d'autre solution, il fallait couler mes mouvements dans les vagues, couler mes phrases dans les souvenirs, couler des injonctions calmes de ma conscience à l'assaut des images obsédantes, de cette autre plage, de cette autre mer, de ce moment-là, éloigné revenant, jamais parti, revenu hanté, me hantant, et qui parfois, encore, revenait et me submergeait.
Pour cela, Ulysse ne pourrait m'être d'aucune aide.
Il fallait les prendre de front, revenir sur le lieu même de sa peur, seule, absolument seule, se laisser submerger par elle, ou surnager, remonter, on le saurait plus tard, on le saurait autrement, à un autre moment, il fallait remonter, revenir du fond de la conscience et des souvenirs, sentir que pour retrouver l'air frais aucune main ne me serait d'aucun secours, aucune main ne me serait jamais d'aucune aide, c'était plus simple, il suffisait de le savoir, couler à pic disparaître, remonter respirer, c'est un même mouvement, vectorialisation de soi, dans un sens ou dans l'autre, une direction ou l'autre, l'un ou l'autre, mais pas les deux, évidemment, assurément pas les deux.
Ce à quoi l'on se tient aisément, et qui enserre, dans le calcul propositionnel, p ou non p, l'un ou l'autre, mais pas les deux : le tiers est exclu.
Donc : oublier. Oublier cela, qui est impossible à oublier. Cela dont l'oubli ne se donnera pas. Contradiction dans les termes, à affronter, maintenant, sans plus attendre, sans plus reculer, plonger, dans la contradiction, dans la vague, la négation des possibles, la fin de tout. Donc le reprendre, le refaire, le rejouer, encore, sans peur, parce que cette fois, au bord de l'eau, il n'est plus possible de faire autrement. Vectorialisation de soi et de sa course propre. Je ne sais pas où Ulysse a disparu mais, sur le rivage, je ne le vois plus, il ne se distingue plus, dans la brume enveloppante, caressante, étouffante de ce mois d'août finissant qui a accumulé toute chaleur possible, va crever un peu plus tard en orage, mais pour l'instant, seulement, la brume de chaleur qui monte de la mer recouvre toute chose de ce monde.
À quoi, donc, on n'échappera plus.
samedi 21 mai 2011
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