Clara et Hannah ouvrent leur blog, au printemps 2011 : l'écureuil du net ! à lire absolument !!!!
Merci à François Bon, qui a accueilli sur Publie.net les Carnets Lointains, et le Manuel anti-onirique.

samedi 5 septembre 2009

Senteur X, la nuit étoilée



Elle s'en apercevait bien, elle avait presque complètement perdu cette journée, commencée dans la nuit, à la gare de Lyon,  fracas des trains, annonces monocordement envoûtantes, annonçant des départs et des retards, journée étirée insensiblement jusqu'à la nuit suivante, sans qu'elle n'eût presque pu rien voir du jour, et presque terminée. Il lui restait de son matin, toujours sur son épaule, un sac de cuir marron, informe, qui pendait sur sa hanche et lui compliquait un peu la marche. La bandoulière avait, par la force de la répétition, usé l'épaule presque jusqu'à la trame. Mais pour l'heure, elle ne s'en souciait pas.

Le contenu de son bagage peu à peu s'était modifié. De l'intérieur du sac, quelques papiers utilisés un moment avaient disparu, à présent sans plus d'usage, la bouteille thermos au matin pleine de thé brûlant l'avait réveillée, réchauffée dans les attentes et le vent, s'était vidée peu à peu, du livre, quelques pages s'étaient tournées, la batterie de l'ordinateur portable s'était vidée jusqu'à atteindre le message promettant la perte du travail en cours en l'absence d'enregistrement, sans que cela modifiât en rien le poids, qui depuis le matin, pesait sur cette journée.

Il lui restait à rejoindre dans la nuit, la vieille ville, à déposer son sac à l'hôtel, prendre une douche et disparaître dans la nuit, loin des jeux de pouvoir dans lesquels elle s'était, toute la journée, confinée. Elle remontait la rue tracée d'un trait de plume par un cardinal-duc, faubourg autrefois très neuf né de son imagination capricieuse. 

Ville du sud, minérale, sous un ciel d'hiver étoilé et pur. Le vent soulevant parfois les pans de son manteau qui par endroit s'effilochaient.

Les façades régulières alignaient leurs fenêtres closes, et quand elle passa devant la fontaine, elle sentit l'odeur de l'humidité monter dans la nuit. Il se formait sur son manteau de minuscules gouttes d'eau, qui luisaient, sous les lueurs des réverbères. Parfois une silhouette poussait une lourde porte de bois, se glissait sous un porche, absorbée dans sa nuit.

Quand, de la boutique de l'antiquitaire à laquelle parfois elle accordait un regard, sortirent deux hommes. Ils portaient sur leurs épaules, comme le mât d'un bâteau, au centre duquel reposait un immense lustre de cristal, un lustre démesuré, féérique dans la nuit obscure, cliquetant et scintillant. 

Elle s'arrêta pour les regarder s'éloigner en silence dans la rue orthogonale, dans le halo que dessinait autour d'eux une brume imperceptible.


1 commentaire:

  1. La journée finalement méritait d'être vécue, ne serait-ce que pour voir passer cette étrangeté,cet espoir peut être sur le dos des hommes.

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