Clara et Hannah ouvrent leur blog, au printemps 2011 : l'écureuil du net ! à lire absolument !!!!
Merci à François Bon, qui a accueilli sur Publie.net les Carnets Lointains, et le Manuel anti-onirique.

vendredi 8 avril 2011

L'∞, 99

Rêves à deux balles, trois francs six sous, si seulement j'avais quatre sous en poche, il aurait eu l'air un peu littéraire, mon rêve. J'aurais eu des références, révérence mon cher collègue. Enfin, si le rêve ulysséen d'∞ est celui d'une bronzette dans les calanques, on a l'indication du prix au printemps 2011, fixé pour la saison, 17 euros pour les adultes et 9 pour les enfants, pas de tarif famille, du moins je n'en ai pas vu. Est-ce à dire que es rêves des enfants sont moins chers… mais il faut reconnaître d'un autre côté qu'ils ne les ont peut-être pas choisis, et qu'on les traîne par décision de Monsieur ou de Madame.

Rêve ulysséen, je garde le mien au cœur palpitant de mes pensées.

Il flotte au-dessus de ma ligne d'horizon. Boussole incertaine. Infixe. Si le Nord est incertain, peut-on dire que je l'ai perdu ? Si je n'ai jamais connu Ithaque peut-on dire que j'en suis exilée ? Si j'ignore où est mon lieu naturel, puis-je artificiellement et de toutes pièces m'en créer un qui soit à moi ? Puis-je extirper du monde des racines qui ne sont pas les miennes pour m'ancrer dans la réalité, prendre pieds, ne plus dériver au gré des courants ? Tous mes efforts n'ont rien donné, ils se sont dissouts dans le sel, corrodés par les désillusions, les échecs, les retards, les mensonges, alors Ulysse a raison, autant se laisser dériver, si le Nord est incertain, il est possible que j'avance dans la bonne direction, que les vents me soient favorables, si je n'ai jamais connu Ithaque, rien ne s'oppose à ce que je la reconnaisse, dès que je l'apercevrais, dès que j'entendrai en elle, mon Ithaque, la palpitation des bruits du monde, et que je sentirai l'odeur des lauriers roses.

L'horizon est incertain, personne ne pourrait dire, personne ne pourrait soutenir, avec assurance et d'une voix qui porte, que je suis perdue.

Même si j'en suis bien persuadée, au moins, les touristes sur le bateau, les touristes dans les calanques, la femme en minijupe rappelée à l'ordre sur le ponton, les couples de retraités sous leurs chapeaux de toile, tous, savent où vont leurs rêves, les encadrent consciencieusement, les cherchent dans des guides, en fonction de la météo qu'ils ont pris soin d'écouter la veille, feuillettent page à page ce qui leur indiquera les contours, tous ils ont des horaires précis, des rêveries en carte postale, horaire fixe et sans surprise, départ à 14 heures, retour à 17 heures. Départ. La sirène du bateau se fait entendre. Les touristes ont un air fier et sage des enfants qui n'ont pas de rêves à eux. Alignement. Le bastingage. Certains, appuyés, accoudés, font un signe de la main qui retombent dans le monde désert.

C'est étrange, Ulysse, où es-tu ?

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