Clara et Hannah ouvrent leur blog, au printemps 2011 : l'écureuil du net ! à lire absolument !!!!
Merci à François Bon, qui a accueilli sur Publie.net les Carnets Lointains, et le Manuel anti-onirique.

mercredi 20 avril 2011

L'∞, 124

Sidération. Les étoiles répandues à même le sol dessinent en attendant les vagues de curieuses galaxies, enroulées, déroulées, amas de galaxies éclatantes et perturbées, qui forment un univers en expansion que la marée montante emportera. Je crois que des gamins bruyants et rieurs les ont rassemblées puis répandues sur le sable, vidant leur seau métallique de leurs découvertes amassées tout le long de ce matin infini. Sidération. Elles constellent le sol et Ulysse, sans plus marquer de temps, les dépasse, mais moi, j'y serais restée des heures durant, à cartographier leurs nébuleuses, à scander leurs mouvements relatifs, s'il ne m'avait remise sur le chemin.

Ce pays de l'entre-deux-mondes détourne décidément les pas de leur course réglée.

Il faut en déjouer les pièges insignes, et cela seul Ulysse en a le savoir immédiat, pour accéder de nulle part à une immense et majestueuse chaussée d'accès. À quoi ? À quel lieu ? Il semblerait qu'ici les routes puissent ne mener nulle part, seulement un peu plus loin dans la solitude face à soi seul, face à soi même. Une chaussée d'accès en pierres de taille parfaitement ajustées surgit du sol de sable et d'eau et trace un trait parfaitement droit. Les dalles s'ajustent depuis des siècles, et je le sais simplement parce qu'elles disparaissent presque entièrement, tout en restant parfaitement ajustées les unes aux autres, sans que le moindre interstice ne vienne jouer.

Chaussée bruissante, de l'eau qui se retire, des coquillages qui crissent sous les pas d'Ulysse et sous les miens, crissante et par endroits silencieuse, glissante parfois des algues vertes et légères qui s'y développent et rendent les pas aléatoires et perdus. Leurs chevelures fines s'étalent, s'étoilent, et les pas sur elles sont moins assurés. Il faut imaginer cet entre-deux-mondes instable parmi toutes les choses instables de tous les mondes possibles et même impossibles, et sur cette surface improbable, sur laquelle nous nous déplaçons, ce trait rectiligne et séculaire que nous remontons en silence n'hésite pas un instant. Je me sais minuscule. Un point, rien que cela, rien de plus qu'un point qui remonte une ligne droite, à distance, toujours la même, d'Ulysse, autre point minuscule dans ce lieu de l'entre-deux-mondes. Le silence entre nous s'est instauré depuis que nous sommes sur ce trait hiératique.

Nous avons traversé une galaxie flamboyante, et voilà que nous remontons une ligne immobile.

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