Clara et Hannah ouvrent leur blog, au printemps 2011 : l'écureuil du net ! à lire absolument !!!!
Merci à François Bon, qui a accueilli sur Publie.net les Carnets Lointains, et le Manuel anti-onirique.

dimanche 22 mai 2011

L'∞, Épilogue, 10

Un mouvement, puis l'autre. Un bras puis l'autre. Respirer. Je crois que je commence à me déplacer. Je n'en suis pas sûre, il n'y a aucun repère, je n'ai aucun repère dans ce désert liquide, calme et vert et bleu, (respirer) qui se soulève, palpite comme une vie. Je n'ai aucun repère, alors il n'y a que cela : un mouvement, puis l'autre (respirer). Je commence à fuir les bords du monde. Pour cela, fuir, un mouvement puis l'autre, puis respirer (se reposer). Les bords du monde verticaux. Je ne les regarde plus, ils ne m'attirent plus, un mouvement puis l'autre, un bras puis l'autre, il faut que je rentre, la côte ne se rapproche pas encore, l'horizon ne s'éloigne pas encore, je ne sais pas, il n'y a aucun repère.

Il faut se concentrer uniquement sur cela : {{un mouvement puis l'autre, un bras puis l'autre (puis respirer)}. Se reposer}}. Juste cette séquence. La répéter. Inlassablement. Autant de fois qu'il le faudra. Ce qui fait que, soudain, dans cette immensité ouverte, bords du monde tout proches, d'où on aurait pu tomber, l'espace soudain se replie, se referme, rétrécit et que, inlassablement, il n'est que cela, cette séquence infime de l'océan dans laquelle se déplie : {{un mouvement puis l'autre, un bras puis l'autre (puis respirer)}. Se reposer}}. C'est tout. Rien que cela. Tant que cela sera possible {{un mouvement puis l'autre, un bras puis l'autre (puis respirer)}. Se reposer}}, alors il sera possible de recommencer un déplacement horizontal, de ne pas seulement s'enfoncer verticalement dans les profondeurs de l'océan.

Inlassablement n'est pas le terme exact.

C'est seulement la tension de ma volonté, seulement elle, purement elle, qui me reconduira sur la côte {{un mouvement puis l'autre, un bras puis l'autre (puis respirer)}. Se reposer}}. Répéter cela. Sans cesse. Ne jamais cesser. Répéter cette séquence. Les mouvements du corps s'en suivront de la pure tension de la volonté. De lui-même, il aurait coulé à pic, il ne servait à rien, plus à rien, il a fallu tendre à l'extrême la volonté, la relier comme une corde à la terre, {{un mouvement puis l'autre, un bras puis l'autre (puis respirer)}. Se reposer}}, imposer cela au corps qui abandonnait et qui redevient utile.

Répéter la séquence. Se reposer. Tant que l'eau me porte, je ne risque rien. Il suffit de faire confiance à l'eau, me reposer sur elle, me reposer en elle, détendre mes muscles, éviter l'épuisement, {{un mouvement puis l'autre, un bras puis l'autre (puis respirer)}. Se reposer}}. Se reposer sur l'eau. Se confier à elle. Elle me porte. Tu vois bien ? Elle te porte.

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