Les adultes sont secs comme des bois flottés. Leurs silhouettes se détachent sur le sol horizontal, se dressent, se relèvent pour aller droit devant elles, alors elles s'inclinent légèrement selon l'angle le plus économique et attrapent la main d'un enfant pour le tirer en arrière.
Elles ne tiennent comptent dans leur démarche ni des ondulations qu'a laissées sur le sol la marée immense qui engloutit l'espace, repousse les vacanciers et répand sur le sable tous les débris marins de ses houles, ni de la ligne de crête des vagues. Elles sont ignorantes de toutes les convexions complexes qui se déroulent silencieusesment. Leur ignorance est aussi éberluante que la brisure des vagues. Je me demande encore comment ils ne s'en aperçoivent pas. Mais la conspiration des rêves est savante et tacite. Elle les tient à l'écart. Ne les laisse pas caresser les flots.
Dès qu'une vague vient se briser sur la plage, il est possible pourtant de suivre la ligne de son déroulement, de son déferlement sur le sol, elle dessine en se finissant des cols, des vallées, des sommets dans le plan horizontal où elles abandonnent leur mouvement qu'elles ourlent d'un fin liseré de sable, avant de se retirer vers la ligne d'horizon. Comme une minuscule frontière suffisante cependant pour retenir les rêves, pour les garder de ce côté du rivage, dans des éclaboussements d'écume. Mais leurs pas les ignorent, ils traversent la plage dans la sécheresse pure de la translation vectorielle,attrapent la main de l'enfant et le tirent en arrière. Sans comprendre la transgression des espaces rêvés qu'ils commettent.
J'observe leurs gestes brisés entre les mèches de cheveux que le vent emmêlent devant mes yeux. Les femmes se passent sur le corps de la crème solaire dont l'odeur masque celle du sel et l'océan. Elles semblent ne pas se souvenir de la caresse des vagues ni de celle des courants. Les hommes marchent au loin. Ils pourraient être en costumes. Poignées de main professionnelle et raideur de la nuque. Décidément, ils sont secs comme des bois flottés.
jeudi 15 juillet 2010
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oui... vous avez raison.
RépondreSupprimer"Secs comme des bois flottés.
Sans comprendre la transgression des espaces rêvés qu'ils commettent".
J'aime ce billet, merci.
Xavier
A la seule différence que les bois flottés ont une âme...
RépondreSupprimer...celle des horizons lointains et de l'écume des rêves qui ont caressé, poli et métamorphosé leur rides.
Ce qu'aucun lifting ne saura faire, hors apparence, pour la raideur des adultes.
Fort joli plume ma chère... et bel oeil ! C'est si vrai qu'on a dû, dans l'enfance voire avant hier encore, t'arracher trop souvent à de précieuses rêveries... (simple et affectueuse supposition)
Révérence.
W*