Clara et Hannah ouvrent leur blog, au printemps 2011 : l'écureuil du net ! à lire absolument !!!!
Merci à François Bon, qui a accueilli sur Publie.net les Carnets Lointains, et le Manuel anti-onirique.

samedi 15 janvier 2011

Manuel anti-onirique, LI



Le plus tenace, ce sont les effluves. Comme des souvenirs entêtants, enivrants. Il suffit que le geste, dans les approximations du matin, qui en ferait reproche ?, recèle un tant soit peu de maladresse, qu'un tremblement infime contredise la main, et le cours des influx nerveux, et les effluves entêtantes masqueront la saveur des instants. Et la senteur, tenace, précède toute impression
, tout le jour durant, la voile, l'entête, empoisonne finalement le jour entier. Sans rémission, sans respiration, jusqu'à l'écœurement.

L'alchimie demande une précision et une sûreté des gestes dont nous ne sommes pas toujours capables. Les à peu près la troublent et déteignent comme des tâches sur la journée, jusqu'à l'oubli de la nuit indulgente. Elle s'est tendue comme un élastique entre deux désastres, cela n'y change rien. Elle le sait, il n'y a rien à faire de ces matins où le pendentif qui ne quitte pas son cou, glisse à terre, s'enchevêtre, et disparaît comme pour refuser les attendus, se perd sous un meuble, se dérobe de lui-même à sa demande.… qu'on l'accompagne…


Souvenirs enivrants brisés à terre, sur le sol froid, dont il ne reste que quelques éclats à ramasser et à jeter sans trop les regarder. Il suffirait cette fois que la main soit légère, ne s'apesantisse pas, le moins possible, ne les serre pas, ne se serre pas sur eux, il faut au geste une étrangeté à soi, une distance jamais démentie sans laquelle les bords tranchants des éclats entailleraient la chair palpitante. Il n'y a qu'à se pencher, les ramasser, tout jeter. Les gisants de ses souvenirs sont là, à terre, gisants liquides de son passé, qu'il faut ramasser et jeter.

Son pied nu les évite (précautionneusement), quitte à marquer un arrêt, au dessus du sol
, aussi longtemps qu'il est possible. Il aurait fallu marquer un arrêt, marquer un temps, marquer le pas, elle est assurément passée trop vite sur certains aspects de la situation, voilà qu'elle sent, en dépit de toute la distance convenable qu'elle tente de tenir avec le monde, quand elle repose le pas, un liquide tiède et épais entre le sol et elle.

Il est un moment possible de laisser l'impression en suspens dans la conscience. De ne pas s'y arrêter. La distance de la focale est convaincante et assez bien établie. Mais à chaque pas l'impression se renforce, insiste, quelque chose de tiède et de visqueux entre ses pas et le sol froid empêche les impressions de se marquer nettement, empêche les appuis sur la surface lisse, et quand elle baisse les yeux, elle voit les traces sanglantes de ses pas sur le monde.

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