Courir. Dévaler les escaliers, descendre, angle droit, descendre de nouveau, et de nouveau un angle droit, ainsi douze fois de suite, jusqu'au changement du sol qui annonce que les Enfers, bientôt, se terminent. Dévaler. Il faut toujours prendre garde de ne pas tomber, emporté dans l'élan, tant l'élan emporte, nous emporte tous. Il n'est pas exclu que nous tombions, que nous dévalions la pente mais qu'importe ? Cela n'a aucune importance ! Dévaler les escaliers, redescendre vers l'air libre, cela suffira, cela suffit ! Simplement, courir … il est encore temps de redescendre, c'est étrange, voilà des Enfers dont il faut redescendre, c'est sans doute à n'y rien comprendre, mais une chose est sûre, il demeure, dans cette dégringolade, une seule certitude, il faut, comme de tous les Enfers, ne pas se retourner, et c'est là la chose la plus difficile du monde.
Nous tous qui essayons, dans cette dégringolade, de ne pas nous retourner, sommes de pitoyables Orphées.
Nous dégringolons, dévalons les escaliers, il est possible qu'il y ait, en bas de cette course, qui sait ?, qui en décidera ?, un café, une cigarette, dans l'air frais encore du matin, ou autre chose, un long baiser dans les bras de l'aimé, ou autre chose encore, la voix attendue de l'enfant dans le téléphone portable, qui sans se rendre compte du baume qu'elle étend sur l'âme, racontera en riant sa dernière infraction au monde sérieux des adultes, et comment elle en a dérogé … cela n'a aucune importance, seulement, cela nous pousse à redescendre, nous happe vers le ciel vif et l'air frais, pourvu qu'il y soit possible de respirer autrement, pourvu qu'une autre palpitation du cœur nous attende en bas.
Avant quoi, il faudrait … tout cela ne sera pas possible sans … si nous ne parvenons pas … simplement à passer les sas, les premiers pas sont les plus difficiles … comment ne pas s'inquiéter … que nous ne soyons pas tous des Orphées ? Que nous puissions n'être que des Eurydices ? Qu'il se puisse que, comme elle, elles toutes, nous disparaissions de nouveau, absorbés dans les Enfers, sans qu'il nous soit aucun pouvoir de résister à notre sort…
je songe à toutes ces Eurydices pitoyables, sur lesquels tous les Orphées, ∞ment pitoyables, se sont retournés.
Inscription à :
Publier les commentaires (Atom)
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire