« Le premier vendredi du mois, chacun écrit sur le blog d’un autre, à charge à chacun de préparer les mariages, les échanges, les invitations. Circulation horizontale pour produire des liens autrement… Ne pas écrire pour, mais écrire chez l’autre. » Vases Communicants
Elle regardait le plafond. Yeux grands ouverts sur une intense obscurité. Elle regardait le plafond avec toute la concentration dont elle était capable, scrutant la masse opaque qui l’enveloppait, cherchant ancrage, le moindre point, la plus petite accroche pour ne plus dériver… Elle regardait, encore, toujours, avec la fièvre du naufragé qui ne veut pas sombrer, le désespoir au bord des lèvres, tout le corps immergé.
Elle souhaitait tant regarder, quelque chose, un rien, même si elle devait l’inventer, l’extraire du plus profond de son imagination, même si elle devait plonger plus loin encore qu’elle ne l’avait jamais fait.
À présent, oui, elle voyait, mais peut-être était-ce un rêve ? La force de sa persuasion ? – comment en être sûre de toute façon ? - certaines formes se dessinaient à peine. Une pâle lueur, proche de l’évanouissement, là-haut, tout là-haut, si haut que la pièce n’avait plus de plafond, une fragile palpitation, tâche frêle hésitant entre dissolution et concentration. Sans qu’elle n’en ait conscience, tout son être, ses muscles même, se tendirent vers la lueur. Sa respiration haletante se cala aux palpitations lumineuses, et ses yeux pleuraient de ne plus vouloir se fermer… Au centre de la tache, dont l’intensité se renforçait à chaque vibration, elle crut percevoir une mouvance. Rien au début, un léger flou, un voile discret, qui peu à peu se renforça en une vapeur sombre et granuleuse. Malgré les larmes brouillant sa vision, elle discernait nettement ce magma dense, chaque seconde enrichi et nourri, irradiant d’un foyer qu’il était impossible de situer… Y naissaient de fines scintillations, tout d’abord éparses, pour devenir, en moins de temps qu’il n’en faut pour un battement de cil, une multitude cristalline. Une blancheur lactée explosait tout autour d’elle, ici et là, en feux d’artifices éblouissants, avant de se mêler subtilement à l’opaque brume bouillonnante.
Incrédule, incapable d’émettre le moindre son, ni même de bouger, elle vit l’obscurité l’entourant se déliter, absorbée par les volutes majestueuses et pleines de matière vivante, scintillante, irradiante. Une voie lactée se déployait au-dessus d’elle, à une vitesse vertigineuse, multipliant l’infini du vide à la multitude des mondes… Sous sa tête, le moelleux de l’oreiller fondit en une fraction de seconde, sous ses doigts les draps lisses se dérobèrent, brusquement aspirés…
À présent, elle flottait, cheveux ondulant paisiblement autour de sa tête, baignant avec grâce dans l’ondée stellaire.
À présent, elle flottait, corps frêle au milieu de l’espace, étrangement rassemblée au plus intime d’elle-même, liée à jamais, à l’infini de l’univers.
Toute peur en elle s’était évanouie…
Elle était libre de rêver.
Liste des autres participants aux Vases Communicants de février 2011 :
Laurent Margantin et Daniel Bourrion Christine Jeanney et Anita Navarrete-Berbel Maryse Hache et Piero Cohen-Hadria Samuel Dixneuf et Michel BrosseauChez Jeannne et Leroy K. May Estelle Ogier et Joachim Séné François Bon et Christophe Grossi Cécile Portier et Anthony Poiraudeau Amande Roussin et Benoit Vincent Marianne Jaeglé et Franck Queyraud Juliette Mézenc et Jean Prod'hom Candice Nguyen et Pierre Ménard Christophe Sanchez et Xavier Fisselier Nolwenn Euzen et Landry Jutier Leila Zhour et Dominique Autrou Claude Favre et Jean-Marc Undriener Clara Lamireau et Michel Volkovitch Bertrand Redonnet et Philip Nauher Joye et Brigitte Célérier
Elle souhaitait tant regarder, quelque chose, un rien, même si elle devait l’inventer, l’extraire du plus profond de son imagination, même si elle devait plonger plus loin encore qu’elle ne l’avait jamais fait.
À présent, oui, elle voyait, mais peut-être était-ce un rêve ? La force de sa persuasion ? – comment en être sûre de toute façon ? - certaines formes se dessinaient à peine. Une pâle lueur, proche de l’évanouissement, là-haut, tout là-haut, si haut que la pièce n’avait plus de plafond, une fragile palpitation, tâche frêle hésitant entre dissolution et concentration. Sans qu’elle n’en ait conscience, tout son être, ses muscles même, se tendirent vers la lueur. Sa respiration haletante se cala aux palpitations lumineuses, et ses yeux pleuraient de ne plus vouloir se fermer… Au centre de la tache, dont l’intensité se renforçait à chaque vibration, elle crut percevoir une mouvance. Rien au début, un léger flou, un voile discret, qui peu à peu se renforça en une vapeur sombre et granuleuse. Malgré les larmes brouillant sa vision, elle discernait nettement ce magma dense, chaque seconde enrichi et nourri, irradiant d’un foyer qu’il était impossible de situer… Y naissaient de fines scintillations, tout d’abord éparses, pour devenir, en moins de temps qu’il n’en faut pour un battement de cil, une multitude cristalline. Une blancheur lactée explosait tout autour d’elle, ici et là, en feux d’artifices éblouissants, avant de se mêler subtilement à l’opaque brume bouillonnante.
Incrédule, incapable d’émettre le moindre son, ni même de bouger, elle vit l’obscurité l’entourant se déliter, absorbée par les volutes majestueuses et pleines de matière vivante, scintillante, irradiante. Une voie lactée se déployait au-dessus d’elle, à une vitesse vertigineuse, multipliant l’infini du vide à la multitude des mondes… Sous sa tête, le moelleux de l’oreiller fondit en une fraction de seconde, sous ses doigts les draps lisses se dérobèrent, brusquement aspirés…
À présent, elle flottait, cheveux ondulant paisiblement autour de sa tête, baignant avec grâce dans l’ondée stellaire.
À présent, elle flottait, corps frêle au milieu de l’espace, étrangement rassemblée au plus intime d’elle-même, liée à jamais, à l’infini de l’univers.
Toute peur en elle s’était évanouie…
Elle était libre de rêver.
Photo et texte : Louise Imagine
Laurent Margantin et Daniel Bourrion Christine Jeanney et Anita Navarrete-Berbel Maryse Hache et Piero Cohen-Hadria Samuel Dixneuf et Michel BrosseauChez Jeannne et Leroy K. May Estelle Ogier et Joachim Séné François Bon et Christophe Grossi Cécile Portier et Anthony Poiraudeau Amande Roussin et Benoit Vincent Marianne Jaeglé et Franck Queyraud Juliette Mézenc et Jean Prod'hom Candice Nguyen et Pierre Ménard Christophe Sanchez et Xavier Fisselier Nolwenn Euzen et Landry Jutier Leila Zhour et Dominique Autrou Claude Favre et Jean-Marc Undriener Clara Lamireau et Michel Volkovitch Bertrand Redonnet et Philip Nauher Joye et Brigitte Célérier
lu aux premières heures, et les mots m'étaient restés présents, et la beauté du texte. Mais je me demandais d'où venait cette main que j'avais piquée pour un montage à propos de ces vases communicants.
RépondreSupprimerJe sais, trop tard. Non que ce soit important
"... avec la fièvre du naufragé qui ne veut pas sombrer, le désespoir au bord des lèvres, tout le corps immergé."
RépondreSupprimerIl est vraiment si beau ce texte, et trouve si bien sa place ici. Délicieux équilibre irradiant.
Bravo à vous deux. .)
Dans la douceur de la lumière et la tension du verbe,une belle lecture.
RépondreSupprimer@allerarome