Clara et Hannah ouvrent leur blog, au printemps 2011 : l'écureuil du net ! à lire absolument !!!!
Merci à François Bon, qui a accueilli sur Publie.net les Carnets Lointains, et le Manuel anti-onirique.

lundi 7 mars 2011

L'∞, 52

Angles (étroitesse des). À leur propos, on n'en dira jamais assez, même si, à un moment, il faudra bien tourner la page. Il faudra bien que la porte se referme. Courant d'air vif. Le chambranle tremble. Elle a claqué. Et le claquement prend la colonne vertébrale. Descend le long du dos. Mais il conviendra néanmoins de les éviter dans ce monde, tous angles, jusqu'aux angles mêmes les plus obtus. Avec circonspection. L'angle étroit, confronté à la finesse de la peau du front (ou plus exactement : la peau du front, confronté soudainement à l'étroitesse de l'angle) posera problème. Il n'est même pas sûr qu'elle résiste. Il se peut toujours qu'elle ne résiste pas.

Mais n'allons pas jusqu'aux grenades éclatées de leur découverte, fendues en deux, et éclatantes. Il s'agit bien de cela. Il s'agit purement et simplement de fuir cet enfermement. Il s'agit seulement de partir de là, dans la nuit noire, sur un chemin impossible, et d'éviter de s'écraser le visage contre (l'acuité des) angle.

Bordure. L'arête entre deux surfaces, qui à proprement parler, d'un point de vue géométrique, est ce lieu (il n'existe pas) où l'on passe de l'une à l'autre, l'une cesse et l'autre commence, sans qu'il y ait simultanéité en aucune façon de l'une et de l'autre, alors que dans le monde matériel, grossier et approximatif, auquel nous nous heurtons, évidemment elle n'existe pas, les surfaces se continuent l'une dans l'autre, au point que la douleur qu'elle nous inflige quand de front, nous les heurtons, en paraît incompréhensible, aussi vive que soit l'arête, et incommensurable au regard de ce que nous infligerait le choc avec une abstraction mathématique.

Est-ce un hasard heureux ?, je ne sais s'il convient de s'en réjouir, les abstractions ne s'incarnent pas si aisément et l'univers est informe et distendu, que nous tentons, dans la nuit, de traverser, sur un chemin caillouteux, inondé des averses passées, et semblerait-il, déjà des averses à venir, qui ne se résolvent pas à s'engager dans les profondeurs de la terre. Il faut croire que, sous nos pas, il y a encore des eaux sombres et silencieuses (la ville après tout continue d'en porter le nom) et que rien dans ce monde n'est content de sa place, n'a trouvé son lieu naturel.

Espoir abandonné (celui du lieu naturel), dont l'exil étrange tire tous les bénéfices. Décidément, l'∞ est loin, depuis que la possibilité d'Ulysse a cessé d'être actuelle.

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